La fièvre du samedi soir pour Nolwenn

La Star Academy ou la naissance d'un nouveau star system. Un passage sur le plateau permet d'y voir plus clair sous les sunlights de la télé-réalité. Jusqu'à se prendre au jeu et avoir des yeux de Chimène pour la belle Nolwenn, l'étoile montante made in Vichy. Rêve ou réalité ?

Etourdissant. Pourquoi ? Parce que l'adjectif a sa part de vacarmes et de merveilles pour décrire un intérieur tout en paillettes. Celui d'un concept télévisuel marchand. Le nom de la bête ? Star Academy. Depuis quelques semaines, on lui cherchait un qualificatif. En conférence de rédaction comme sur le canapé. Subitement concernés par le cas régional : "Nolwenn, 20 ans, originaire de Saint Yorre."
On ne pouvait pas en rester là. Il fallait monter à Paris, s'imprimer du "Musiiiique" et voir de près, de l'intérieur, la (télé) réalité. Au placard, les préjugés intellos dans la valise, les jumelles pour aller se rincer l'oeil, un samedi soir.

Mise en bouche

19 heures, plaine Saint Denis. Dans un "village" où les animateurs, les producteurs, les managers, les habilleuses ... règnent en seigneurs. "Bienvenue aux studios des émissions phares de notre chaîne", sourient les troupes d'Etienne Mougeotte. Rendez vous sur le plateau du prime time, qui croque la plus belle part d'audience sur le réseau. Depuis que la seconde promotion d'académyciens a fait sa rentrée il y a deux mois, dans le château de Dammarie Les Lys, plus de 8.5 millions de téléspectateurs sont devant leur poste à 20h50 sur TF1.

19h28. Tout un "peuple" est mobilisé autour de l'enceinte. Agé de quatre ans et plus, corps et âme, il fourmille. D'un côté, les coulisses et le cercle VIP avec badge, tapis rouge, bulles pétillantes pour qui est titulaire d'un passe-droit. Identités types : Lionel Richie, Lorie, Laurent Voulzy, maire, hôtesses, faiseuse de lacets lorsqu'une diva décide de remettre à la pub ses tennis ou encore tous les accrédités de TF1, Endemol et Glem productions.
Entrée facile. De l'autre côté, une foule d'anonymes qui pensent concrétiser le rêve d'assister en direct au show. Pour les plus véloces à l'arrivée sur les lieux, chips salées, eau plate, et heure(s) d'attente. Coincés à l'extérieur, les exclus sont réduits au régime sec : barrières, bonnets, et déceptions de devoir attendre 23 heures et des poussières et applaudir le star academécien de sortie. Entrée "pérave", comme dirait Jerem ...

20 heures. Dans un cercle de la salle, discussions animées entre adultes invités. Extaits : "cette télé poubelle importée des Pays Bas, quelle imposture !" ; "le comportement des candidats est bidonné" ; "22/24 heures, ils se laissent filmer."

20h10. Hurlements de joie. Le fanclub arrive. Dans son numéro de bonimenteur de cirque, le chauffeur de salle fait monter le mercure. "Levez les bras, applaudissez, tapez du pied, surtout quand je fais signe. Dansez ! Criez Jérémiiiiii, Auréliiiiiiiiie, Nikooooosssss ! Plus vous en ferez, mieux on vous verra ! Pas de ouuuh ! C'est négatif." Pendant la pub, l'homme briefe les plus réticents : "l'image, s'il vous plaît ! Laissez vous aller à la fièvre du samedi soir !">

De la pure réalité

20h50. Le rythme s'accélère. La pression devient maximale sur le plateau. 280 privilégiés dévorent le divertissement. "Vue à la télé ! C'est mémé qui va être contente !" sourit Sandrine, une jeune professeur de français de 32 ans venue spécialement de Metz. Derrière, Maryse, 15 ans, gesticule : "Je ne veux pas que Jerem sorte." La jeune fille fait partie du fanclub. Comme Corentin. Sa préférée à lui, c'est Nolwenn. "Elle est belle ! Elle chante bien, c'est ma grande soeur qui le dit." Un autre adolescent de jubiler : "On a de la chance d'être là ! Mon pote, il crisait quand je lui ai dit que je serais dans le public, ce soir !" ... Sous les feux de la rampe, les élèves sont assis, cernés par quatre caméras et les rails d'un travelling. Nolwenn, Georges Alain, Emma, Houcine et les deux nominés, Aurélie et Jérémy, sont installés dans une promiscuité encore plus flagrante qu'à la télé. Un banc plus loin, Alexia, la directrice, est pleine de peps ; Kamel, le chorégraphe, trop fashion. Raphaelle, la prof d'expression scénique, a les cheveux en pétard, papote avec ses voisins, Oscar et Mathieu. Beaucoup plus discrète, Armande, la Callas de la Star Ac', est comme béate d'admiration quand Nolwenn, son "Casanova au féminin", prend le micro pour chanter. "Le plus grand faible de mes oreilles", confie t-elle.
Jusqu'à la fin du prime, le public reste concentré. Des duos le font rire, Nikos et Jerem, les élans de spontanéité aussi, le smack d'Aurélie et de Jerem ... Des prestations musicales lui soutirent quelques larmes à l'oeil. Nolwenn et Laurent Voulzy, Nolwenn et Lionel Ritchie ... Parfois, des spectateurs s'interrogent. "Mon oeil, comme s'ils ne s'étaient pas déjà vus en coulisses, Emma et ses parents !" ...

23h30. Nikos rend l'antenne. Un mot revient sur toutes les lèvres : "Etourdissant". D'aucuns diront que la Star Academy est un pur produit marketing. Mais le phénomène touche aujourd'hui des millions de foyers français. Il s'est forgé sa popularité. Il a fabriqué un large public, une génération de "djeun's", friands d'autographes et d'adultes qui suivent avec de moins en moins de modération. La "Star Ac" est désirée par les français. De la pure réalité !

Rachida EL AZZOUZI.




ARMANDE ALTAI : "NOLWENN IRA LOIN"

Du quintet restant, elle est la seule à posséder ce don. Celui d'être toujours remarquée même quand elle est à l'écart. Singularisée pieds nus sur le plateau pour mieux signifier son mystère. Signalée en bout de table en conférence de presse, non pas par des éclats de voix intempestifs, mais par la photogénie de son visage. Brillante lorsqu'elle déroule son timbre de voix au milieu des autres académyciens ... Nolwenn grave son empreinte dans les esprits comme la romancière Emily Brontë a su l'épanouir en littérature avec "Autant en emporte le vent."
La brune Saint-Yorraise en impose. "Je ne veux pas être formatée. Je n'aime pas les mondanités. La mélancolie est en moi, la joie aussi. Je veux rester moi."
Sans strass, Nolwenn respire à voix haute une véritable fibre artistique. Une manière de s'imposer sans simagrées, qui attise d'ailleurs des jalousies rarement déclarées. "Nolwenn par ci, Nolwenn par là, mais elle est la plus fausse de tous" soulignent ses détracteurs, qui ne sont pas uniquement Georges Alain et Houcine. Leur grand soulagement ? "De toutes façons, l'idéal Star Ac, c'est Emma."
Pourtant, "même si elle ne gagne pas le 21 décembre, Nolwenn sera sollicitée par une maison de disques" affirment les pointures du showbiz dans les couloirs. Et Armande Altaï, qui regrette "la fausse allégeance d'Emma", est là pour les convaincre. Un verre d'eau glacée à la main, l'exéburante mais non moins profonde professeur de chant, insiste : "Nolwenn ira loin. En terme de musicalité, elle est beaucoup plus en avance que les autres élèves. Je la vois mener une carrière internationale dans le pop rock. Elle balance l'anglais sublimement." Et d'ajouter : "Nolwenn est capable de plaire à une autre clientèle que Star Academy."
Armande la connaît mieux que quiconque dans le milieu. En février 2001, bien avant les castings, une jeune fille s'était présentée à son cours, salle Offenbach au centre du Marais. Timide à l'extrême, voûtait, elle rentrait des Etats Uni et voulait progresser dans ses vibratos. Son regard azur était noyé par de grosses lunettes. Tremblante, elle avait chanté "La vie en rose". Fusion d'oreilles. Armande réalisait là, la beauté et le talent d'une fillette proche de la maturité, Nolwenn. "Elle est réservée et romanesque. Son combat, je peux vous le dire à 58 ans, sera d'être douée et belle dans un monde peuplé de méchants."
En attendant, Nolwen participe à la tournée Star Academy 2. Elle sera à Clermont ferrand, maison des Sports, le 30 mai 2003.